Pages d'écriture / 1998-99 / Exil, de Saint-John Perse / Texte de Benjamin
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     Celui qui se sent incompris, celui qui n'a pas le droit à la différence et qui est coupé du monde, celui qui ne choisit pas son destin, celui qui sait ce que les autres n'imaginent pas, celui qui est toujours aux aguets, celui qui en a marre de la vie planifiée, celui qui se sacrifie pour les autres sans s'en rendre compte, celui qui n'a pas d'autre issue que le rêve, celui qui tourne en rond encore, encore et encore, celui qui se cache, celui qui l'a fermé trop longtemps et qui explose, celui qui crache à la figure de la mort, celui qui sait qu'il est né pour vivre, celui qui se change en poussière parce qu'il s'ennuie, celui qui trouve le monde trop rond, celui qui le trouve carré, celui qui pense qu'il est plat, celui qui le trouve difforme, celui qui voudrait se reposer à force de surcharge, celui qui a connu les responsabilités trop tôt, celui qui trouve sans jamais avoir voulu trouver ni chercher, celui qui se rend compte de sa chance, celui qui n'en a pas, celui qui a sa face cachée, celui qui se démasque pour se dévoiler aux autres, ceux qui se trouvent malins alors qu'ils sont stupides, ceux qui se trouvent stupides alors qu'ils sont malins, celui qui a peur de la mort, celui qui la défie, ceux qui subissent la vie, celui qui la veut ;

     tous ceux là sont très différents, et pourtant, ils vivent dans le même monde.

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